Si vous êtes passé.e freelance (ou travaillez avec des freelances), il y a des chances que vous ayez déjà entendu parler de ces fameuses "plateformes de freelancing". Ces plateformes permettent de connecter entreprises et clients en quelques heures.

Le truc, c’est que comme dans toute entreprise, elles viennent avec leur lot de bénéfices... mais également d'inconvénients.

Voyons cela ensemble.

1 - Les promesses à double tranchant

1.1 - L'audience

Les plateformes de freelancing sont créées pour connecter des acheteurs (des clients, qui cherchent des prestataires) et des vendeurs (des freelances, qui vendent leurs services).

Cela veut dire que :

• Si vous êtes freelance, les plateformes sont faites pour vous permettre de trouver une mission. 

• Si vous êtes client.e, les plateformes sont faites pour vous aider à trouver un.e freelance.

C'est génial.

Mais, parce qu’il y a un “mais”, c'est génial si vous correspondez à leur audience.

En effet, comme freelance, si vous cherchez plutôt des missions en petite entreprise à Marseille, une plateforme dont la majorité de la clientèle est en Grand Groupe à Paris, aura plus de mal à vous proposer des missions...

Et d’ailleurs, vice-versa. Comme client.e, si vous êtes une grande entreprise à Paris qui cherchez des experts réseaux, mais que la plupart des freelances de la plateforme sont des développeurs Web à Montpellier, la plateforme sera peut-être moins efficace à vous proposer le bon profil.

Vérifiez donc bien quelle typologie d'audience adresse la plateforme sur laquelle vous vous inscrivez. 

1.2 - Le matching

Nées pour la majeure partie dans l'ère du numérique, une des grandes forces des plateformes sont leur niveau d'automatisation.

L'une des innovations majeures étant leurs "algorithmes de matching", "algorithme de recommandation", ou tout simplement "système de filtrage avancé". 

Ces systèmes permettent de connecter plus rapidement un besoin avec un ou plusieurs profils. Ils identifient avec rapidité et précision la mission ou le CV que vous recherchez.

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Cependant, ces systèmes présentent encore quelques failles, notamment celle de l'expérience.

En effet, par défaut, les profils proposés pour une mission sont toujours les plus expérimentés. 

Par exemple, si un client à une mission dont l'expertise majeure est "Adobe XD", les premiers profils qui ressortent sont les personnes avec le plus d'années effectuées sur "Adobe XD".

"C’est normal", me diriez-vous.

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Oui. Mais en valorisant le nombre d'année d'expérience, il reste qu'il faut garder plusieurs bémols en tête :

=> Si vous êtes client.e :

• Le profil que les plateformes vous recommandent n'est peut-être pas le profil pépite que vous recherchez.

En effet, on sait aujourd'hui que le nombre d'années d'expérience sur un outil n'est pas toujours corrélé au niveau qu'une personne a sur un outil.

Vous connaissez certainement des personnes autour de vous qui ont appris très vite, ou dans des équipes de haut niveau, et qui, malgré leurs 2 ans d'expérience, sont tout aussi bonnes, voire meilleures que des personnes ayant 10 ans d'expérience.

• Si vous recherchez des personnes sur une technologie plutôt nouvelle, peut-être même que l'expérience sur la technologie vous importe moins que la tête bien faite qui saura rapidement jouer avec cette technologie

• Si on vous pousse toujours les profils les plus expérimentés, ils seront forcément plus chers… Même si ce n’est pas forcément ce dont vous avez besoin.

=> Si vous êtes freelance :

• Ces algos sous-entendent que si vous cherchez à faire une reconversion, débutez dans le milieu, ou tout simplement, souhaitez bouger sur de nouvelles fonctions, la plateforme ne vous permettra peut-être pas de trouver votre mission.
• Pire, elle vous recommandera sans doute des projets sur la base de vos expériences passées, sans considérer vos souhaits. 

Imaginez : vous avez passé 10 ans à faire des Traductions Français-Espagnol. 

Mais cette année, vous désirez faire des Traductions Français-Italien. Selon vous avec ces algos, combien de missions Français-Espagnol vont vous être proposées par rapport au nombre de mission Français-Italien ?

• Si une plateforme favorise majoritairement ceux avec beaucoup d’expérience sur une technologie, un outil, un métier…. Il est très facile de savoir comment se valoriser sur une plateforme ;)

=> Le point de vue Erwin :

Nous trouvons d'ailleurs ce système plutôt dichotomique :

Les personnes expérimentées dans un domaine font moins appel aux plateformes de freelancing, car ils ont plus de facilité à trouver des missions.

Au contraire, ce sont les profils les moins expérimentés qui ont besoin d'un "coup de pouce" pour trouver des missions et s'inscrivent sur les plateformes.

Au fait, le saviez-vous ? Aujourd'hui, la moitié des développeurs dans le monde ont moins de 6 ans d'expérience (Source : Clean Coder)

1.3 - Les tarifs

 En général, les tarifs des plateformes sont moins élevés que ce que peuvent offrir des Sociétés de services ou cabinets. Là où une plateforme peut prendre entre 10 à 15% de votre TJM sur de l'Assistance Technique, les ESNs se situent plutôt au-delà des 20%.

Cela reste cependant beaucoup moins intéressant évidemment que si vous travaillez en direct avec votre client, puisque dans ce cadre, 100% de votre TJM facturé vous revient.

D'une autre part, rares sont les plateformes vous offrant des prix cassés ou dégressif.

Ainsi, si vous signez pour un contrat de 3 ans, il est tout à fait possible que la plateforme prenne 10 à 15% de votre TJM tout au long de la mission. Oui, même si au fond, le plus gros de son travail (la mise en relation) a été récompensée depuis bien longtemps.

Note Erwin : nous entendons / lisons beaucoup que les cabinets ou sociétés de conseils margent beaucoup. Trop. 
Peut-être, mais nous aimerions ajouter un élément de contexte. 
Les sociétés de conseil sont ainsi faites qu'elles proposent à leurs clients leurs consultants (des employés de leur entreprise qui vont travailler chez le client). 
Cela implique un nombre conséquent de frais : coûts induits par le salariat (assurance, retraite, salaire etc.), coûts des formations, coûts de gestion (managers) et surtout, pertes nettes si les consultants sont en inter-contrats, c'est-à-dire, sont entre deux missions et ne rapporte que peu à l'entreprise. 
Toutes ces charges, que les plateformes de freelancing n'ont explicitement pas, sont à compenser, et peuvent générer des marges prises plus élevées sur vos propres contrats. 
Oui, même si vous n'êtes pas employés de leur entreprise et que ce ne sont pas vos affaires. Nous reviendrons plus longuement sur ce sujet en partie 2.

2 - Les purs avantages

2.1 - L'administration et la facturation

Là où les cabinets et autres sociétés de conseils étaient déjà princesses, les plateformes sont reines : l'administration.

‍Les plateformes ont compris une chose : la qualité du suivi administratif et la rapidité de facturation et de paiement sont l'un des piliers d'une mission qui se déroule bien. 

(... et des coûts amoindris : moins de support, moins de rattrapages, moins de tâches manuelles...)

Par leur vision produit, une large partie des plateformes du marché ont fait le choix de l'automatisation : validation efficace des documents, signature des contrats en ligne, facturation automatique, paiement rapide (grâce à leurs solutions d'affacturages).

Objectivement, c'est normal. 

Avec la taille de la population freelance inscrite sur leur plateforme, allant de quelques centaines à plusieurs milliers (voire dizaine de milliers), automatiser n'était pas une option, mais une nécessité. Et, il y a évidemment, des contre-exemples. 

Mais, en moyenne, la qualité de ces processus est plutôt impressionnante.

Et, encore ! Nous ne comptons pas ici les efforts fournis par les plateformes pour leurs contrats et le suivi en jurisprudence.

2.2 - La position d'arbitre et l'engagement à la qualité

Les plateformes ont une chance que tout le reste du marché leur envie : elles n'ont pas à gérer d’inter-contrats.

Un inter-contrat est une période où un consultant se situe entre 2 missions chez un client. C'est un coût net pour les cabinets et les agences. Les commerciaux qui doivent placer leurs consultants sont “forcés” de les valoriser, même s'ils savent que le consultant ne correspond pas parfaitement à la mission. 

D'ailleurs cela peut aussi engendrer une multitude de dérives (falsification de Dossier de Compétence, Survente, TJM plus élevés pour les autres consultants en mission, etc…), qui ont rendu, à tort, le métier de commercial en ESN une image de "vendeur de viande".

Petit moment auto-promo, j’ai parlé de ce sujet quelques mois auparavant, lien juste ici

Dans le cas des plateformes, les personnes inscrites ne possèdent pas de lien de dépendance avec elles : les freelances ne sont pas employés des plateformes, et les plateformes ne se sont pas engagées à trouver une mission à chaque freelance qui s’inscrit.

Cela permet aux personnes travaillant dans la plateforme de ne pas avoir besoin de pousser un profil qui correspond moins bien. Elles peuvent proposer le profil disponible qui semble le mieux convenir. 

En plus de cela, à force de voir les freelances et les missions passer, les plateformes ont acquis une large vision du marché. Grâce à leur capacité à regarder l'état de leur base de données, ils peuvent plus facilement recommander des profils, recommander le bon prix, la bonne durée pour la mission, etc.‍

Cette position d'arbitrage bénéficie tant aux entreprises qu’aux freelances. Les plateformes recommandent la mission qui vous correspond le plus, sans favoritisme. 

Et, (normalement), elles ne vous proposent une mission que si vous êtes disponible. Pas parce que vous devez remplacer quelqu'un, ou parce que sur une autre de leur mission le TJM est plus juteux.

Les plateformes vont même jusqu'à offrir une multitude de partenariats sur la base de ce qu'elles estiment peuvent vous apporter (du partenariat technique aux prix préférentiels pour des banques)

‍Seul bémol, les plateformes vont peut-être pousser les freelances les plus expérimentés / les plus chers, là où les ESN ont une pression à facturer leurs consultants en inter-contrat. Dans ce cadre, il reste préférable pour elles de facturer même 400€ une personne qui en vaut 500, plutôt qu'attendre la prochaine opportunité, en gagnant 0€ en attendant.

3 - Les purs inconvénients

3.1 - L'accompagnement humain

Les plateformes ont pour majorité des personnes (Community Managers ou Account Managers) qui vous aident à trouver la bonne personne / trouver la bonne mission. 

Mais, gardons en tête que les plateformes ont des communautés pouvant aller de quelques centaines à plusieurs milliers (voire centaines de milliers). 

En général, le ratio sera de 1 employé de plateforme pour 500 à 1000 freelances. Sans compter le nombre de clients avec qui l’employé doit garder le contact.

Si vous avez la chance d’avoir une personne de la plateforme sur laquelle vous êtes inscrit.e au téléphone, il y a des chances qu’elle connaisse très bien le marché et vous donne d’excellents conseils / avis. Sachez cependant qu’elle n’aura pas un temps infini à vous accorder, et qu’il y a peu de chance qu’elle vous garde en tête indéfiniment. 

L'objectif d'une plateforme reste la quantité de missions signées, et d’automatiser au maximum le reste, via le produit. 

En parallèle, les personnes des plateformes assureront beaucoup moins le suivi de mission ou l’accompagnement, que d’autres commerciaux.

3.2 - Le bruit

Être inscrit sur une ou plusieurs plateformes, c’est beaucoup de bruit. 

Entre les notifications de nouvelles missions et les demandes de mise à jour de disponibilité et de TJM, et les feedbacks sur les dernières missions… Votre boîte mail et vos différentes messageries vont commencer à être très sollicitées.

Cela a d’autant plus d’importance que certaines plateformes valorisent dans leur matching “l’investissement” que vous avez avec elle (votre réactivité, vos échanges, etc.)

Aujourd’hui, certaines entreprises innovantes (comme Pylote) vous permettent de “calmer” ce bruit ambiant. Reste que les plateformes, que vous soyez en mission avec elle ou non, vous demanderont du temps.